Le contrôle sur les prix de transfert concerne AUSSI les PME !

Toutes les entreprises ayant des relations internationales intragroupes sont sujettes à contrôle sur les prix de transfert, pas uniquement les grosses structures ! Et les redressements dans ce domaine peuvent être conséquents.

Enjeu : permettre aux entreprises qui sont en deçà des seuils documentaires de se préparer correctement en amont pour faire face aux redressements de plus en plus nombreux en matière de prix de transfert.

Dès qu’une entreprise réalise des opérations transfrontalières (financières ou opérationnelles) avec des sociétés de son groupe, elle est sujette à un contrôle sur les prix de transfert, quelle que soit sa taille.

Exemple : les sociétés qui sont détenues via des LBO devront justifier leurs pratiques de prix avec des sociétés du groupe éventuellement situés à l’étranger.

Problématique fiscale

Les entreprises françaises dépassant un certain seuil de chiffre d’affaires ou d’actif brut (ou bien détenues ou qui détiennent une entreprise remplissant ces seuils) doivent produire une documentation de prix de transfert :

  • Pour les entreprises avec un chiffre d’affaires ou d’actif brut > ou = à 400 M€
    Obligation de produire une imposante documentation dite « master file » (CGI, art. L 13AA) qui doit être mise à la disposition de l’administration en cas de contrôle (pour l’instant). La loi de Finances 2018 a transposé l’action 13 de l’OCDE (rapport BEPS) en complétant le champ de cette documentation. Les informations sont désormais imposantes et analytiques faisant de la documentation un document stratégique pour l’administration.
  • Pour les entreprises avec un chiffre d’affaires ou d’actif brut > ou = à 50 M€
    Obligation de produire une documentation « allégée » à transmettre dans les 6 mois de la liasse (CGI, art. 23 quinquies B Loi Sapin II).
  • En deçà rien à produire, MAIS pour autant : toutes les entreprises ayant des relations internationales intragroupes sont sujettes à contrôle Prix de Transfert, qu’elles soient soumises ou non à une obligation documentaire.

Les risques

Les entreprises soumises à l’obligation « allégée » peuvent se contenter de remplir le formulaire simplifié sans idée précise de leur politique prix de transfert. Or, ce formulaire est utilisé par l’administration comme un outil d’analyse pour lancer ses contrôles.

Les ETI/PME soumises à l’obligation « master file » doivent gérer une documentation extrêmement lourde et parfois inadaptée à leur taille, trop souvent improvisée.

Les filiales françaises de groupes étrangers n’ont bien souvent pas la main sur la documentation groupe, rédigée de manière décorrélée des enjeux français, tandis qu’elles défendent seules leur contrôle en France.

Enfin, beaucoup d’entreprises ignorent qu’il convient d’être détenue ou détenir une entreprise remplissant les seuils décrits plus haut, pour être dans le champ de l’obligation documentaire. Certaines ne sont donc pas en ligne avec l’obligation.

Enfin, celles qui n’ont aucune obligation documentaire, ignorent qu’elle doivent tout de même se préparer en cas de contrôle.

Sanctions

L’absence de documentation met l’entreprise face au risque immédiat de redressement (entreprise non préparée). Par ailleurs, elle fait l’objet de sanctions qui pourraient être aggravées à l’avenir (en discussion en France) :

Par exemple : lorsque l’entreprise vérifiée ne produit pas la documentation « master file » requise ou produit une documentation incomplète, elle est passible d’une amende s’élevant au plus élevé des deux montants suivants :

  • 0,5 % du montant des transactions non couvertes par la documentation transmise à l’administration,
  • 0,5 % du montant des transactions non couvertes par la documentation transmise à l’administration,

Le montant de l’amende ne peut être inférieur à 10 000 € et est applicable au titre de chacun des exercices.

Erreur à ne pas commettre

Oublier de se poser la bonne question : mon entreprise appartient-elle à un groupe et a-t-elle des opérations à l’international avec ce groupe ?

Les bons réflexes

Si l’entreprise est une cible concernée par les prix de transfert, alors elle doit :

  • vérifier si elle est soumise ou non à une obligation documentaire ;
  • dans tous les cas, cartographier les flux opérationnels et financiers avec son groupe ;
  • bâtir sa justification de prix intragroupe avec l’aide d’un professionnel (avocat fiscaliste spécialisé dans ce domaine).

Quid en cas de contrôle fiscal ?

Anticipez vos risques ! N’attendez pas la notification de redressement pour vous faire aider d’un avocat fiscaliste. L’administration reviendra difficilement en arrière à ce stade de la procédure, et ce type de contrôle demande beaucoup de temps de préparation en amont.

Pour l’entreprise française contrôlée, exemples d’impacts :

  • Politique de prix définitivement dictée par l’administration
  • Impact IS sur le rehaussement en base (redressement se compte en points de marge nette (ebitda) le plus souvent)
  • Rejet des pertes fiscales antérieures (effet mécanique du recalcul des prix)
  • Retenue à la source pour revenus réputés distribués sur le rehaussement (sauf si l’entreprise accepte le redressement (CGI, art. L 62A)
  • Intérêts de retard 2.4 % par année de retard sur le rehaussement IS (et sur celui de la retenue à la source si elle est due)
  • Impact potentiel TVA/douane sur le rehaussement
  • Impact CVAE sur le rehaussement
  • Impact sur la participation des salariés
  • Pénalité éventuelle pour mauvaise foi 40 %
  • Responsabilité éventuelle juridique / pénale des dirigeants
  • Réputation/Image de l’entreprise en jeu

Mots clés : start-up, PME, PMI, prix de transfert

Auteur : Catherine Roussière, avocat à la Cour, CR avocat

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