Cession d’entreprise :  attention à la rédaction de votre GAP !

Les clauses de garanties de passif, largement recommandées dans les cessions d’entreprises sont aussi source d’un contentieux important. Objectif :  éviter qu’elles soient analysées en clauses de réduction de prix ou inversement, les conséquences fiscales pouvant être diamétralement opposées pour les parties.

Cet article s’adresse particulièrement aux dirigeants cédants et aux repreneurs d’entreprise. Enjeu : l’impact fiscal, qui n’est pas le même entre une clause de garantie de passif et une clause de révision de prix 

Pour anticiper les risques et déceptions post-cession, l’acquéreur d’une entreprise peut avoir recours à des garanties légales et/ou des garanties contractuelles pour se protéger.

Les garanties contractuelles communément utilisées sont les garanties dites de bilan (garantie contre les variations de l’actif et du passif de la cible ou GAP) et les garanties dites de valeur (garantie contre la baisse de valeur des titres ou des actions de la cible ou clauses de réduction de prix). Ces deux types de garanties sont fréquentes et recommandées dans les cessions d’entreprises.

Ces garanties ne sont pas encadrées par des textes car elles relèvent du droit des contrats. Les clauses se définissent donc par rapport au contenu du contrat fixé entre le vendeur et l’acquéreur.

 –> Des clauses mal rédigées sont donc source de contentieux entre les parties et d’une possible « qualification » par le juge
  –> Or l’indemnité et la réduction de prix n’emportent pas les mêmes effets aux plans financier, juridique, fiscal et comptable

D’un point de vue fiscal, la garantie de bilan (ci-après clause GAP) doit être traitée comme une indemnité. Or, d’un point de vue financier, elle est souvent confondue avec la garantie de valeur qui équivaut à une réduction ou révision du prix de la cible au bénéfice de l’acquéreur (ci-après clause de réduction de prix).

Le régime fiscal applicable suivra la qualification juridique donnée soit par le juge en cas de contentieux, soit par l’administration fiscale en cas de contrôle de l’une des parties à la vente, soit par les parties si le contrat ne fait l’objet d’aucune équivoque.

Il est important de noter qu’une cession d’entreprise attise souvent l’intérêt de l’administration fiscale pouvant amener à un contrôle et un redressement de la cible cédée et de fait déclencher la garantie. Le contrat de garanties peut être analysé par l’administration fiscale à cette occasion ou à l’occasion d’un autre contrôle.

–> La frontière entre ces deux clauses cousines est ténue et pourtant elles poursuivent un objectif diffèrent et emportent des conséquences fiscales parfois diamétralement opposées. L’objectif des parties est donc d’éviter que la garantie voulue initialement soit comprise ou analysée autrement dans le temps.

Qu’est ce qu’une clause de GAP ?

Appelée aussi garantie de bilan, la GAP est la garantie par laquelle le cédant s’engage à prendre à sa charge après la cession et pour une durée déterminée, l‘intégralité (sauf plafonnement) de l’augmentation du passif social ou de la diminution de l’actif dont la cause ou l’origine est antérieure à la date de cession. On va reconstituer ici le bilan à la suite des variations subies par la cible.

Le cédant va donc verser une somme d’argent supplémentaire au repreneur correspondant à cette augmentation du passif ou cette diminution de l’actif et égale à la totalité de la variation constatée (sauf plafonnement…).

Régime fiscal d’une GAP

Pour le cédant :

Pour le repreneur :

Qu’est ce qu’une clause de révision de prix ?

Appelée aussi garantie de valeur, c’est la garantie par laquelle le cédant s’engage à consentir une réduction de prix à l’acquéreur en cas de baisse de la valeur des parts ou des actions cédées, soit du fait de l’apparition d’un passif et/ou diminution d’un élément d’actif après la date de cession.

Régime fiscal d’une clause de révision de prix

Pour le cédant :

– au régime des moins-value à long terme si la plus-value initiale a été traitée comme une plus-value à long terme (régime des PVLT/MVLT). Lorsque la plus-value de cession initiale a bénéficié d’un régime de sursis ou d’exonération, la réduction de prix n’a aucune incidence sur le résultat imposable. La moins-value relative à la réduction de prix ne peut pas être imputée et tombe en non-valeur ;

– à défaut, cette perte fera l’objet d’une déduction dans les conditions de droit commun si la plus-value initiale a été taxée au taux plein.

Pour le repreneur :

Que se passe-t-il en cas de confusion entre la GAP et la clause de révision de prix ?

La matière relève de la liberté contractuelle. C’est pourquoi, on trouve une très grande variété de formules dans les conventions entre les parties. De plus, une grande majorité de conventions vont utiliser l’appellation « bénéficiaire » tant pour qualifier l’acquéreur que la société émettrice des titres. Toutes ces situations rendent la différenciation entre les deux clauses de garantie très compliquée.

En conséquence, c’est dans le droit commun des obligations qu’il y a lieu de rechercher les réponses aux difficultés d’interprétation de la clause de garantie après en avoir déterminé les caractéristiques. En cas de litige, le juge va rechercher la commune intention des parties pour déterminer quel type de clause elles ont entendu stipuler.

Après avoir longtemps utilisé le critère de l’effet sur le prix, la jurisprudence récente utilise désormais un critère plus simple :

Conclusion

Vous comprenez mieux désormais pourquoi il faut éviter que la clause de garantie de passif soit comprise ou analysée en une clause de révision de prix -ou inversement. Ces deux clauses ne recherchent pas le même objectif (l’une indemnise et l’autre réduit le prix), n’emportent pas les mêmes effets financiers (le calcul n’est pas le même) et n’entrainent pas non plus les mêmes conséquences juridiques, fiscales et comptables.

Il est, dès lors, fortement recommandé de vous faire accompagner d’un avocat dans votre cession d’entreprise qui saura retranscrire correctement la garantie souhaitée dans le respect des droits des obligations. Cet accompagnement vous garantit une sécurité contractuelle dans la mise en œuvre de la garantie et vous évitera des contentieux couteux, longs et stressants.

Pour plus d’informations, contactez-nous. CR avocat vous oriente et vous accompagne dans votre opération.

Mots clés : cession – garantie de passif – GAP – repreneur – cédant

Auteur : Catherine Roussière, Avocat à la Cour

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